samedi 31 août 2013

Récidive et surpopulation carcérale

Quelle timing !
Le livre La peur dans l'ombre, dans sa version papier voit le jour en même temps que les propositions gouvernementales.
Ce n'est pas le fruit du hasard mais une main tendue au roman à énigme ou thriller (voir article précédent) La peur dans l'ombre qui se déroule justement dans l'une des maisons d'arrêt française.
Quant au projet de loi, qui déjà fait couler beaucoup d'encre, ou plus exactement des flots de paroles...paroles et paroles....c'est tout ce que tu sais dire...chantait Dalida...
 
 




Thriller, Polar, Policier, Roman à énigme

Alors thriller ou policier

Le thriller est un roman qui se passe du côté de la victime. Plus exactement du côté de la peur de la victime. Le lecteur vibre au même rythme que les sens du personnage mis à rudes épreuves. Dans un thriller, ce n'est pas tellement la résolution d'une énigme, meurtre ou autres douceurs...qui tient le lecteur en haleine. Le pourquoi, comment et qui? passe en second plan. Il y a comme une toile d'araignée qui se tisse autour d'une victime bien inconsciente d'un danger qui plane. L'écrivain joue sur les nerfs de son personnage malmené autant qu'il joue avec ceux de ses lecteurs. Malmenée, le personnage principal, cible de la vindicte d'un méchant retors, n'est pas le héros de l'histoire. Il subit, aveugle, alors que nous lisons bien souvent de la voix du méchant les terribles menaces qui pèsent sur lui. La peur nous tient en haleine et c'est ce qui est bon dans un thriller...

Policier

Le roman policier, dans une belle lapalissade, est une histoire du point de vue du policier. Cela peut être raconté à la troisième personne mais ce sont les réflexions et autres sentiments du policier qui seront dévoilés. Dans un roman policier, ou policier, c'est l'enquêteur qui nous ouvre les portes de l'énigme. Avec lui, le lecteur découvre les personnages et les faits. L'intelligence du policier, qu'il se nomme le fameux Maigret ou autre Adamsberg, se livre à un travail bien souvent intellectuel qui comble le lecteur de bonheur. Au fil des pages, ce sont les questions du comment, du qui et du pourquoi qui nous tiennent collés au livre.

Roman à énigme Miss Marple, ou sa devancière Miss Silver de Patricia Wentworth, ou tout autre Sherlock Holmes qui ne sont pas au service de leur état donnent au texte un air de roman policier parce que l'enquête se mène du niveau de l'enquêteur.Sans l'alcool, la lassitude d'un détective qui voit le monde en noir, nous ne sommes pas dans le polar. Un meurtre, un vol...que cherche à découvrir le héros en apparence en même temps que le lecteur. Le roman à énigme baigne souvent dans un monde bien peint, une atmosphère dans laquelle le lecteur plonge avec délice. D'autant plus lorsque l'action se passe dans un temps passé. Douceur, (malgré les meurtres !) des logis anglais aux murs de roses et de feuilles légères. A la lecture d'un roman à énigme, le lecteur comprend dès les premières pages que rien ne lui sera dévoilé avant la fin. Quant au roman a suspens, il me semble qu'il trouve sa place plus auprès du roman à énigme que du polar.

Polar Noir, le polar est bien écrit à l'encre du pessimisme comme le roman noir qui le précède. Si comme avec Miss Marple et confrère, le héros, ou antihéros, est un détective, l'homme ou la femme qui mène l'enquête a bien souvent des difficultés à tenir les rennes de sa propre vie. Le cliché du détective à la descente d'alcool fort illustre le mal de vivre qui ronge notre personnage principal. Le polar est aussi l'occasion de peindre une société qui ne roule pas si bien que cela. Le détective de polar, puisqu'il est le témoin d'une société et d'une époque se balade peu à travers le large monde. Il ne s'agit pas de creuset, intrigue en monde clos, et si le détective fait de nouvelles rencontres humaines, il caracole peu sur les routes. Et... Il y a bien sûr d'autres genres. Les politiques fictions, l'anti-héros plus noir que le détective du polar, le thriller psychologique, l'énigme vu du côté du malfrat..et j'en passe. Mais j'ai choisi de ne pas brosser une palette trop large. L'avenir, grâce à de nouvelles plumes, verra l'émergence de nouveaux types de romans "dit" policiers. Telle est la littérature, vivante et créatrice... Cela pour dire quoi...que parfois les frontières sont minces. Le héros de roman se faufile entre thriller et énigme jusqu'à ce qu'il se fasse voler la vedette par un policier qui mène l'enquête coûte que coûte. Mon roman La peur dans l'ombre a souvent été le prétexte de discussion : roman policier, roman à énigme ou thriller ? J'aime assez le terme de roman à énigme pour La peur dans l'ombre. L'histoire se passe dans un monde on ne peut plus clos...la maison d'arrêt des femmes de Fresnes ! Comme Creuset il y a rarement mieux. Alors roman à suspense, thriller ? La sortie de La peur dans l'ombre en version papier livrera toutes les réponses !

mercredi 28 août 2013

La principauté de Monaco, la France, une cellule

Poème de Luigi Ciardelli, co auteur du Prisonnier du rocher. Avec son aimable autorisation, bien entendu...

CAFARD

Dans mes cinq mètres sur trois,
Je vis en concubinage
Avec quelques cafards.
Je vis dans l'hygiène et j'aime la propreté,
Mais ils sont là !
Leurs trajectoires géométriques ne m'importunent pas,
Leur ascension des parois ne m'affole pas.
Aucune sensation de panique....
Phobie?
Parce qu'ils sont porteurs de maladies,
Vecteurs d'infection ?
Voilà bien leur seule utilité.
Aucune odeur, aucune puanteur !
Leur langue n'est ni travestie, ni idiote,
Ni fausseté ni hypocrisie,
Ni jalousie, ni envie.
Ils ne vous font pas d'illusion,
Ils ne vivent ni d'amour intéressé,
Ni d'amitié mercenaire.
Qu'ils soient noirs, jaunes ou marrons,
Ils remuent leurs petites cornes …
Qu'ils sont loin, heureusement ! de l'humanité,
Celle qui a les vraies cornes !
Eux n'ont rien d'humain,
Ce sont seulement de petits êtres futiles
Qui sillonnent mes murs,
Dans une incessante recherche de nourriture.
Ils vivent dans les placards.
Je suis au placard avec mes cafards.

L'homme sillonne les planètes,
Semant haines et rancoeurs,
Labourant la tyrannies et ramassant son sang.
Qui est le véritable cafard?
Homme, ne sens-tu pas l'odeur de ta conscience ?
Les maîtres de la planète devraient peut-être
Adopter des cafards sur leurs étendards.

 

mardi 27 août 2013

Ambassade de France à Barcelone ou comment aller chercher de l'aide ailleurs

L'#Ambassade de France# à #Barcelone#,  un petit morceau de terre française en pays étranger, accueille ses ressortissants en langue espagnol.
-Bonjour monsieur, je me suis fait voler mes ....
-Hablo espagnol...
Mais je ne suis pas en France là, symboliquement du moins ! Enfin, ce n'est pas grave puisque le monsieur me fait de grands gestes qui m'indiquent que je dois entrer dans la pièce derrière moi. Un mur de verre, une porte transparente et je comprends que je ne suis pas la seule touriste à me retrouver en galère parce qu'un voleur est passé par là. Va falloir attendre, les volés font la queue !
Assise sur ma chaise, je comprends rapidement qu'après m'être fait prendre mes papiers et ma carte bleue je vais devoir batailler ferme auprès de l'agent administratif qui a  la curieuse hypocrisie de ne pas regarder la jeune fille qui est en face de lui. Un regard fuyant, de longs soupirs exaspérés, qui en disent long sur ses possibilités d'empathie !
Des femmes, il va en recevoir, le préposé ce matin là.... le bureau est rempli de jeunes filles qui se retrouvent sans papier et sans argent à la suite d'un vol. A croire d'un rapide coup d'œil, inutile de faire des statistiques, qu'il est plus facile et moins risqué de piquer le sac d'une fille que d'un homme. Pourquoi prendre des risques, me direz-vous ?
Mais revenons à notre agent administratif, employé par la France, qui termine d'établir une pièce d'identité provisoire à cette jeune fille qui s'est fait voler son sac la veille dans un restaurant. La vingtaine à peine, comme sonné par ce qui vient de lui arriver. Plus un sou, et pas le moindre papier sur elle pour prouver son identité elle ne pourra pas prendre son avion de retour. Elle a le visage pâle, je ne crois pas qu'elle ait beaucoup dormi de la nuit. L'inquiétude de se retrouver démuni en pays étranger est certainement pour beaucoup à son insomnie. Un bon coup d'agrafeuse la ramène sur terre. C'est à dire en terre française, incise sur la terre espagnol.
-Voilà, 23 euros.
-Mais j'ai pas d'argent....j'avais 5 euros dans ma poche qui me restait je m'en suis servi pour faire les photos d'identité que vous m'avez demandé...
Coup d'œil vache de l'agent administratif. On va pas la lui faire le coup de j'ai pas de sous !
-Je vous l'ai dit hier que c'était 23 euros !
-Mais je ne les ai pas...
Je commence à me dire que si j'ai besoin d'aide ce n'est pas à l'#ambassade de France# que je vais la trouver. Et je ne suis pas la seule à me faire cette réflexion. Deux belles blondes sont entrées avec pour seul bagage un petit papier sur lequel est écrit l'adresse de l'Ambassade de France à Barcelone.
-23 euros, mais je n'ai pas un centimes on m'a tout piqué !
-et des photos d'identité en plus, ca coûte au moins 5 euros...
Mais monsieur regard fuyant sent le vent tourner. Il dit que "elles mettent la charrue avant les bœufs, qu'elles anticipent...."
-23 euros, je ne les ai pas ! répond l'une des blondes.
-C'est quoi votre compagnie, pour l'avion ?
-C'est '''''''''''(société""""" que j'ai pris la peine de coder, pas de pub gratuite ici :)
-Pas besoin de pièce d'identité avec eux.
Soupir des deux jeunes filles. Rassurées, elles nous rendent à notre silence. Mais le regard fuyant du "rassureur" ne me rassure pas.
Mon tour arrive. La jeune fille s'est fait prêter 23 euros par une de ses copines qui a eu la bonne idée de venir la retrouver à l'Ambassade. C'était son dernier billet mais après tout il faut bien s'entraider. elle verra bien auprès de qui elle ira chercher de l'aide à  son tour. Donc, je me retrouve assise derrière le bureau à expliquer de quelle manière je me suis fait voler mon sac. Plus de pièces d'identité mais pour moi ce n'est pas grave, je ne prends pas l'avion. Par contre je n'ai plus un sou, même pas un centimes ! Encore moins un euros pour sortir la voiture du parking....
-J'espère que vous allez pouvoir m'aider ?
-Ici on conseille, nous n'avons pas de possibilité...
-Oui mais il faudrait au moins me prêter de quoi sortir la voiture et mettre un peu d'essence pour rentrer.
-Non, on peut rien ...
-Comment ça vous pouvez rien ! Je suis bien à l'Ambassade de France non ? J'ai plus un sous en poche, je pense que l'Ambassade de France est là pour aider en...
-Ne vous inquiétez pas, il y a des solutions, dit-il avant de se lever subitement.
-Ah, dis-je, s'il y a des solutions !
-Mais oui, dit-il et je sens qu'il cherche à glisser un sourire sur ses lèvres qui pourtant rechigne à dessiner cette ligne ascendante. Il détale comme un lapin, les yeux collés à ses chaussures.
Je l'attends. Il va revenir....et bien non, il ne revient pas. Il y a un truc dans ma voix qui lui a filé les chocottes et c'est une dame qui se pointe avec un formulaire dans la main.
-Alors voilà, dit-elle, je vais vous expliquer comment aller chercher de l'aide ailleurs qu'à l'Ambassade de France. Bon, j'avoue, ce n'est pas ce qu'elle a dit. Du moins pas exactement...Mais cela donne le même résultat. La bonne dame conseille de se rendre à un point Westernunion ! Merci mais l'argent à Westernunion, il vient comment ? Ce n'est certainement pas ma banque qui va puiser dans mon compte sur un simple appel téléphonique. Pour un peu, elle me taperait sur les doigts comme une mauvais élève parce que je n'ai pas un ami ou un membre de ma famille susceptible de m'envoyer de l'argent via Westernunion....
-Votre assurance, c'est le mieux. Et comme la bonne dame est sympathique, et qu'elle use de son temps sans compter, elle m'explique où trouver le numéro de mon assurance collé derrière la vignette verte sur mon pare-brise...
-Attendez, dis-je, l'Ambassade ne peut pas prêter de l'argent ? Juste de quoi rentrer en France ?
-Non, nous n'avons pas ce genre d'accord (?)
-Je suis ressortissante française dans les ennuis et l'Ambassade ne peut rien faire ?
-Non.
Prêter de l'argent est pourtant sans risque. Les impôts récupère la somme et ce n'est pas un don...Mais voilà, je suis repartie sans rien. Avec un formulaire qui indique que Westernunion est un bon plan et que mon assurance a un numéro spécial pour l'étranger.
Et les jeunes filles qui se retrouvaient seules à Barcelone, sans argent et sans papier ? Et bien elles font comme tout ceux qui viennent demander de l'aide à l'Ambassade....elles se d.....
Elles se d.....mais en tout cas, on ne leur sert pas un café si elles n'ont rien mangé depuis la veille. On ne leur demande pas comment elles vont. On ne cherche pas à savoir si elles pourront manger à midi et ce soir. Non on ne le demande pas parce qu' on connait la réponse. Elles ne mangeront pas !
 
 
 

lundi 26 août 2013

Ebook ou version papier, à vous de choisir !

Elle alluma la télévision et la voix nasillarde du présentateur emplit la pièce. Tout plutôt que le silence… Sur la table, le repas du soir refroidissait. Encore une soirée qui commençait. Verrous tirés à 18 heures, c’était une nuit en plein jour. La voix de la fille d’à côté couvrit le bruit de la télévision. " Qui c’est qu’a des clopes ". Comme si c’était l’heure de s’en préoccuper ! ça allait encore faire toute une histoire. Elle allait brailler à n’en plus finir jusqu’à ce que la surveillante vienne derrière sa porte. De toute façon, ce ne serait pas elle. Prise la main dans le sac, elle dirait que c’est la main de la détenue d’à côté.

- Tu peux pas te taire ! se mit à crier Linda.

Au son de cette voix, Jessica sentit sa peau se glacer. La prison, c’était dur à crever, mais fallait encore qu’elle en bave avec cette garce de Linda qui lui menait des journées d’enfer.

- Ta gueule ! insulta une autre.

Bien envoyé…Son petit plaisir du soir. Entendre ce qu’elle ne pouvait pas dire. Par peur. Pourtant, Linda c’était pas une costaude. Des bras maigres comme des bâtons de réglisse mâchouillés. Une face en biseau aux joues creuses. Des yeux bleus délavés de voir le mal partout, et d’en souhaiter dix fois plus. Une bouche serrée qui ne laisse passer que de l’acide. Et l’acide de Linda, en ce moment, il était pour Jessica. Du coup, plus personne n’osait lui parler de peur de recevoir des éclaboussures. De mensonges en rumeurs, Linda avait transformé le délit de vol de Jessica en maltraitances à enfants. Parfois, attaques de petits vieux. Cela dépendait de son humeur. Rien qui ne tenait la route, mais restait accroché à sa réputation comme à une toile d’araignée. À trente trois ans, Jessica vivait sa plus pénible détention. Et ce n’était pas parti pour s’arranger.

Dans le couloir, la surveillante rôdait. Si la fille d’à côté n’avait pas pris la peine de guetter la matonne, elle allait se faire pincer. Jessica frappa contre un tuyau. Un coup bref lui répondit. Message reçu.

Dans l’assiette transparente, les flageolets s’étaient figés au milieu de leur sauce verdâtre. Du bout de la fourchette, Jessica retourna le morceau de viande, le mit sous son nez et renifla. Il n’avait pas une mauvaise odeur, juste une sale couleur. Faut que je mange, pensa-t-elle. Des trucs déguelasses, j’en ai mangé dehors. La fine bouche, je la faisais pas même les jours de richesse. L’argent dans la dope, et la bouffe ramassée devenait un festin.

Calée contre l’oreiller, les jambes allongées le long de la couverture rugueuse, Jessica essaya de sombrer dans le sommeil. Malheureusement, seule l’angoisse l’engluait dans sa visqueuse mélasse. Sous sa maigre poitrine, elle sentit son cœur bondir d’une telle force que son corps n’était plus que martèlements. Elle n’y échapperait pas. Comme chaque soir, la bataille contre l’anxiété allait la briser un peu plus. " Je vais lâcher du lest " décida t-elle. " Au point où j’en suis, un cachet de plus ou de moins ne me tuera pas ". Sept, elle en était à sept par jour. Qu’est-ce que c’était par rapport à une mixtion dardée dans ses veines trouées ? Fallait passer à huit.

Demain, elle règlerait le problème.

" Bon, Jessica ma fille, huit cachous, en plus de ton traitement de substitution à la drogue, c’est beaucoup ". Mais il ne fallait pas qu’elle crève derrière la porte de cellule. Et c’est ce qui lui pendait au nez si elle ne barrait pas le chemin à cette bête malfaisante qui l’accaparait aux premiers silences. Médicament miracle ! paraît-il. Tant mieux. Jessica n’en pouvait plus de ses crises oppressantes qui la saisissait le soir au mieux, à n’importe quel moment, au pire. 

Jessica serra les minuscules cachets roses. Deux pour voir venir. À prendre en cas d’angoisse.

- Le soir, en même temps que le somnifère, lui avait-on précisé. Avec ça, vous allez faire des rêves de bébé.

C’est curieux la vie, la vision des deux cachets roses sur la table la calmait déjà. Mais il est encore tôt. Dans le couloir, elle imaginait le chariot qui déambulait sur le sol cimenté. Derrière les portes, les filles obéissantes, ou trouillardes, attendaient l’assiette à la main. Et puis quoi encore !

- Tavrier , repas.
- J’arrive, j’arrive, ronchonna Jessica. Y’a pas le feu…

L’assiette sur la table. Le cachet rose à côté. Dommage qu’elle n’avait pas le courage d’affronter ses peurs nocturnes. Ou celles du jour. Parce que la Linda, ne lâchait pas prise. Ce matin, qu’est-ce qu’elle avait trouvé à dire, en plein milieu de la cour, " que Jessica racontait sa vie et celles des autres aux surveillantes, et que elle, Linda, elle allait lui faire la peau si elle continuait ". Une menace pour lui foutre la trouille. Encore qu’avec Linda, allez savoir ? Cette salope avait sorti son mensonge avec un tel aplomb, que les filles bruyantes telles des abeilles dans une ruche avaient ravalé leurs cancaneries. Ce foutu silence, aussi soudain que sinistre, lui avait coupé la respiration. Le silence, Jessica détestait ça comme un tombeau. Alors, pas moyen de se libérer de sa frayeur et de répliquer du tac au tac, de lui clouer le bec au moins une fois à cette salope de Linda. Bien sûr, ce n’était pas vrai. Et les autres filles le savaient. De là à blaguer avec Jessica….fallait pas trop en demander à ces petites jeunes qu’avaient pas fait comme elle des années de prison. Il était loin le temps de la maison d’arrêt d’Avignon. Quelle équipe elles faisaient toutes ! Une ambiance du tonnerre. Faudrait qu’elle se tire de cet endroit, y avait bien des taules plus cool qu’ici. Mais quelle justification pour un transfert ?

En fait l’idée n’est pas bonne et Jessica le savait. Tout ce qu’elle allait y gagner ce serait d’être isolée des autres. Elle se sentait assez seule comme ça, merci.

A ses souvenirs, l’angoisse esquissa un prélude à ses assauts. Cloîtrée pour la nuit… L’oppression était forte, elle redevenait l’unique réalité. Le monde disparaissait. Jessica n’était plus qu’une masse de chairs. Un cercueil avec son corps dedans. à peine si son âme volait au-dessus.

Jessica remplit son verre d’eau d’une main tremblante. Pour une fois, elle n’eut pas le réflexe de bloquer sa respiration afin de ne pas sentir l’odeur d’urine qui montait des toilettes jusqu’à sa bouche. Le liquide glissa dans sa gorge. Le cachet rose effleura les parois de son tube digestif. Elle sentit le médicament la pénétrer et ce contact lui redonna le sentiment d’exister.

" Pour un effet garanti, il faut prendre le somnifère en même temps que le cachet rose ", lui avait-on expliqué.

Voilà dix minutes que Jessica était allongée sur son lit. Les médicaments commençaient à agir. Ses muscles se détendaient. Au creux de sa poitrine, les battements de son cœur ne menaçaient plus. Elle était en paix.

Le pied de la surveillante frôla la porte. Ce bruit vint chercher Jessica au creux de son sommeil. Etait-elle réveillée ? Non... C’était comme si elle flottait. Un rêve certainement… Ou un trip en trop …Voyons, qui lui avait vendu sa dose hier ? Impossible de se souvenir…Essayer de rassembler les images de la veille. Une rue, une maison, un bout de puzzle sur lequel poser l’histoire de sa soirée.

Jessica tenta de remuer dans son lit. Juste un mouvement, pour activer sa cervelle figée contre son crâne. Non…La main alors, un doigt … Son corps n’obéissait plus. La paix qui la berçait quelques secondes auparavant se fissurait. Il y avait un truc qui ne collait pas… Où était-elle ? Et pourquoi ne pouvait-elle pas se souvenir du visage du dealer ? Peut-être n’y en avait-il pas ? Si, il y avait quelqu’un. Une main, un cachet rose. A prendre impérativement le soir, avec le somnifère. Qui parle ? Des yeux derrière une porte. Close. Et puis des grilles. Et le silence, le soir. Prison…Elle était en prison ! Pas d’overdose alors... Tant mieux, elle croyait qu’elle allait crever là. Mais non. Elle était en prison, dormait dans " son " lit. Jessica était détendue grâce au cachet. Dans ce cas, pourquoi sa main ne bougeait t-elle pas ? Pourquoi son corps refusait-t-il d’obéir au besoin impérieux de savoir si elle était vivante ? L’inquiétude à nouveau s’insinuait. Côtoyait le calme qui la rendait sereine malgré la certitude. Parce qu’elle savait…Mais pourquoi ? Par quel tortueux chemin du destin elle avait survécu à l’enfer de la drogue, pour venir mourir dans cette prison.

Dans le couloir, le bruit des pas de la surveillante résonnaient. Jessica tenta de rallier le peu de force qui lui restait. Elle devait appeler…Mais aucun son ne montait de sa gorge. Elle essayait pourtant, encore et encore. Puis résignée, bercée par la plénitude qui l’envahissait, Jessica cessa de lutter contre la mort.




 
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Bientôt La peur dans l'ombre en version papier !

vendredi 2 août 2013

ALBI

Séance dédicace à Albi, le samedi  3 août à la librairie Transparence (9  rue timbal).